Le Paint’Tube est une performance ayant vu le jour en 2006, je la pratique régulièrement depuis, je la modèle et l’éprouve dans des lieux éclectiques.
Elle met en scène un tube transparent mesurant 1,75 m de haut x 1 m de diamètre, de la peinture, des pinceaux, moi, collaborant avec des participants étrangers à l’expression plastique.
Cette hybridation produit des résultats captivants et surtout une atmosphère unique qui pose la question de la place de l’oeuvre dans la société.
L’intérêt réside non seulement dans le rapport entre l’artiste et les participants mais également dans la production d’une oeuvre en relation avec un public, un moment.
Le matériel que j’utilise est une feuille de Lexan© de 2mm d’épaisseur de 1,75m de haut par 3m de long roulée sur elle-même et boulonnée à ses extrémités afin de la maintenir en forme de tube. L’encombrement au sol est alors d’environ 1m de diamètre.
A disposition sur l’aire, des blouses de protection, des pinceaux, des brosses, des rouleaux, de la peinture acrylique
Le public est invité à peindre sur la surface lisse, à l’extérieur.
J’interviens quant à moi à l’intérieur du tube en noir, au trait. Je me sers des dessins réalisés par les passants et grâce au phénomène de paréidolie, je souligne les figures qui m’apparaissent. Dans le projet «Public Art Project», j’utiliserai la matière fournie par les habitants des quartiers mais également le décor urbain qui constituera un fond très riche pour moi. Ainsi, un building pourra se transformer en chimère...
Au terme de la performance, le tube est déboulonné et ouvert, dévoilant ainsi le véritable endroit de la fresque qui réside à l’intérieur.
L’improvisation prend forme à l’extérieur ET à l’intérieur :
«Au centre de l’oeuvre, je tente de m’imprégner de chaque dessin, de le magnifier, de le retranscrire, le souligner, le transformer, le marier à son voisin. Je reste à l’écoute du monde resté au dehors de ma bulle et je ris, je crée, je me nourris de tout ce que je peux voir ou entendre et la maïeutique n’est plus une souffrance mais devient un plaisir partagé avec mes peintres. Cette sensation est d’autant plus forte que mes aides sont frustrées, comme j’ai pu le constater avec des détenus.»
Ainsi les motifs représentés à l’extérieur du tube me servent de trame de fond pour raconter une histoire sur l’envers. Tous les éléments de la performance influencent ma narration. Pour citer Alighiero e Boetti, « Mon problème n’est pas de faire des choix en fonction de mon goût, mais d’inventer des systèmes qui choisissent ensuite pour moi. »
Petit à petit, je disparais sous la couche de peinture, je ne distingue plus l’environnement autour de moi, je me retranche mais ma «bulle» et pourtant je suis inondée de dessins produits par des inconnus qui deviennent mon univers. A partir de ce moment, je ne travaille plus qu’à partir de leur matière.
A l’extérieur, mon collaborateur encadre et veille au bon déroulement de l’oeuvre collective. Ainsi les profanes sont invités à combler les vides ou au contraire à empiéter sur certains dessins. Il faut motiver les intimidés, canaliser les survoltés et contenir les publics plus difficiles.
Un des moments phares est bien-sûr l’ouverture du tube où l’endroit de l’oeuvre est enfin dévoilé. On peut alors lire sur les visages de l’étonnement suivi d’une expression de fierté, les sourires et les figures qui s’illuminent sont ma plus belle récompense et c’est à cet instant que jaillit la plus grande émotion.
Le Tube est ensuite roulée dans l’autre sens et reste exposé sur son lieu création.
Il peut égélement être encadré pour être fixé au mûr.